Le 59 Rivoli - Ateliers d'artistes (2)

Publié le par Nadine Averink

Sortie du mois de Novembre avec les élèves du cycle terminal de l’enseignement optionnel et de l’enseignement de spécialité du lycée Paul Claudel d’Hulst.

 

La cage d'escalier
Entrée du 59

 

Cet espace artistique situé à deux pas de la place du Châtelet, accueille dans ses murs plusieurs artistes en résidence. Voici son histoire :

Le 1er novembre 1999, Gaspard Delanoë, Kalex et Bruno Dumont forcent la porte d’entrée du 59 rue de Rivoli à Paris, une architecture haussmannienne laissée à l’abandon pendant huit ans par le Crédit Lyonnais et les pouvoirs publics. Une dizaine d’artistes viennent squatter l’immeuble, l’habiter et y installer leurs ateliers en libre accès pour le public. Autogéré par le collectif « Chez Robert, Électrons Libres », le 59 Rivoli accueille dès sa première année d’existence plus de 40 000 visiteurs. En 2000, une décision judiciaire les contraint à quitter les lieux : les artistes squatteurs ont alors 8 mois pour évacuer l’immeuble. En 2001, Bertrand Delanoë (maire de Paris de 2001 à 2014) s’engage à racheter l’immeuble. L’institutionnalisation du 59 Rivoli ouvrira symboliquement la voie à la signature d’autres conventions d’occupation telles que celles de la Tour 111, la Petite Rockette, le Jardin d’Alice, la Gare XP, la Générale, le Théâtre de Verre et d’autres collectifs d’artistes-squatteurs. Le lieu devient donc conventionné, fermé durant quelques années pour travaux la réouverture officielle du 59 Rivoli intervient le 9 novembre 2009. Cette date clé légalise la présence des artistes, encourage l’élan créatif dont ils sont porteurs et marque la pérennisation d’un projet devenu réalité. L’idée : accueillir, dans un lieu alternatif, un essaim d’une trentaine d’artistes disposant de leurs propres ateliers et à même de partager avec le public l’expérience d’une création quotidienne.

 Les élèves ont encore une fois pu échanger avec les artistes et découvrir Les Confins une exposition de dix artistes de la Réunion présentée au 59 Rivoli. Christiane Fath, Masami et Sylvie Rimlinger connue sous le pseudonyme Vie 464 ont pu expliquer leur travail, leur démarche.

Masami avec les élèves

L’artiste japonaise Masami précise « Mes installations se situent à la lisière de l’art contemporain et des arts traditionnels ». Formée aux techniques ancestrales du tissage et de la teinture, elle met la fibre au cœur de son travail. Ses matériaux de prédilection sont le vétiver, la fibre de canne à sucre, le chanvre mais surtout le choka vert de la Réunion, une plante aux longues feuilles d’un vert vif. L’artiste nous explique : « J’ai utilisé des matières qui viennent de la choca, une plante de la famille du cactus. J’ai extrait plus de 1 000 feuilles, ça m’a pris un an ». Avec ses seize mètres de long et ses sept mètres de haut, sa pièce jaune, blanche et orangée intitulée Non Titre envahit une partie de l’espace d’exposition de façon tentaculaire. La fibre de choka vert, patiemment décortiquée au sabre puis lavée, a été tricotée avec les doigts. Les mailles aléatoires accentuent les effets vaporeux de cette gigantesque sculpture molle installée pour une partie à même le sol et pour l’autre suspendue à la rambarde de l’escalier. Elle impose sa proximité aux spectateurs. Son épaisseur toute laineuse donne envie de toucher ou de s’enfoncer dans la matière.

Christiane Fath avec une élève

Christiane Fath a expliqué son processus créatif au travers de ses tentures exposées sans cadres. Ce travail s’inspire des mosaïques trouvées dans le sous-sol méditerranéen. Elle réinterprète ainsi picturalement ces motifs antiques pour les associer à des réseaux de lignes enchevêtrés. "Ce sont des toiles de ménages achetées sur les marchés, explique-t-elle. J'ai commencé à faire des grands formats sans châssis. J'ai travaillé sur des tissus familiaux dans lesquels, au moment de leurs départs, les femmes ont l'habitude de rouler ce qu'elles ont de plus précieux. C'est un réflexe de survie et de protection. C'est une recherche de mes origines et une recherche sur la peinture". Ces tissus qu’elle recycle font d’elle une digne représente de l’art textile contemporain.

 

Sylvie Rimlinger connue sous le nom d’artiste Vie 464 détaille son œuvre auprès des élèves : un travail autour de plusieurs jeux de cartes, découpées et travaillées, présenté notamment sous la forme d’un triptyque et intitulé L’autre côté de la mer, chaque image est travaillée dans un format Raisin (65 x 50 cm). Chacune d’elle est composée d’un jeu complet de 52 cartes, découpées et agencées pour donner naissance à une scène dont précise-t-elle « Chacun peut en faire sa propre lecture ». Elle explique également aux élèves que les jeux de 52 cartes sont basés sur le calendrier grégorien : il y a 4 couleurs pour les quatre saisons de l’année, 12 figures pour les 12 mois, 52 cartes pour les 52 semaines. La somme de tous les points d’un jeu de 52 cartes plus le joker est de 365 pour les 365 jours de l’année. Le total de chaque couleur donne 91 points (les valets, dames et rois valant respectivement 11, 12 et 13 points), ce qui donne en multipliant par quatre 364 points, auquel on ajoute un point de joker. Un jeu classique est livré avec 2 jokers, ce qui donne alors un total de 366 pour les années bissextiles. Ainsi, dévoile-t-elle un jeu complexe de résonnances littéraires et symboliques puisque ses collages, recomposent le monde à sa manière tout comme ses textes qu’elle écrit en parallèle.

Dessin de Paula Manuel Rubio

Puis dans les étages nous avons rencontré l’artiste en résidence Paula Manuel Rubio. Son œuvre est un mélange de techniques telles que la peinture acrylique, l’huile et le graffiti. Son travail s’exprime surtout sous forme de portraits, la plupart du temps féminins. Mais ce soir-là ce sont ses paysages urbains que nous avons pu admirer en particulier celui où l’on voit la façade du Centre Pompidou tracée au feutre fin noir.

 

L'artiste Francesco Bouhbal réalisant notre portrait collectif dans son atelier

Pour finir par une explosion de couleurs, nous nous sommes arrêtés l’espace d’un temps dans l’atelier aux murs bariolés de Francesco Bouhbal. Il nous explique que « Tout part de la matière. La peinture est posée frottée pressée étalée projetée ». Ces couleurs forment le fond du support. « Et soudain de ce bouillon de formes et de couleurs surgissent des traces d’humanité. Un visage se modèle. Un corps se profile. » L’artiste dessine alors des figures au feutre noir. De cette rencontre est née une image celle d’un portrait non pas d’une seule figure mais de nous tous, tout le groupe, les élèves, le professeur. Croqués sur le vif nous sommes devenus modèles vivants pour quelques instants.  

Portrait collectif peint et dessiné par Francesco Bouhbal

 

Photos N Averink

Publié dans Sorties

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